[Témoignage Pépin] Bilan de l’action de valorisation de l’artisanat d’Alice avec AJE au Sénégal

Alice est arrivée chez Frères des Hommes au sein de l’équipe de Lille de la Pépinière de la Solidarité Internationale en 2022. En mai 2023, elle se rend au Sénégal pour mener à bien une action de solidarité avec Action Jeunesse Environnement (AJE), une association partenaire de Frères des Hommes. Après un mois passé là-bas, elle revient sur son parcours, le montage de l’action et ses moments forts. Place au bilan qu’elle dresse de cette action, de ses rencontres et expériences sur place, de ses surprises, mais aussi de ses apprentissages, de son regard sur la notion d’alliance et les rapports de domination et enfin, de sa vision de la suite de cette action avec Frères des Hommes.

La préparation de l’action solidaire à l’étranger avec sa tutrice et le partenaire

Etudiante à Science-Po Lille, Alice sait déjà que le journalisme, la gestion de projet et l’international sont des domaines d’action qui lui parlent. La solidarité internationale s’est donc rapidement intégrée dans son parcours. Pour procéder au choix d’AJE, elle se fie à un tableau comparatif où l’on retrouve les échanges interculturels, les problématiques socioéconomiques, les champs d’actions et les régions qu’elle croise avec ses motivations et des échanges avec un autre pépin. « Pour faire le choix d’AJE j’ai regardé les projets antécédents (…) je me suis rendu compte qu’avec cette association il y avait une grande liberté de projets et d’actions possibles. C’est ça qui m’a beaucoup intéressé ! » nous confie-t-elle.

L’action du Pépin à l’étranger demande de la préparation et des échanges en amont. Lors du choix de l’association, on pose les attentes et les objectifs de son action pépin «  on fait cet exercice comme si on écrivait une lettre à soi-même avant le départ . Lorsque je l’ai relu avant ma restitution, je me suis rendu compte que j’avais plutôt bien définie le projet et mes seules craintes étaient de ne pas répondre aux attentes des populations et l’ONG. Mais finalement tout s’est bien passé ! » Puis vient la mise en contact avec la structure « ce qui a été très sympa, c’est qu’à partir du 2ème visio, j’ai déjà pu commencer à proposer des idées et des actions. J’ai proposé 4-5 projets qui correspondaient à certains axes et c’est ensuite eux qui ont choisi en fonction des leurs besoins.  » Cela rappelle que le Pépin vient réaliser une action solidaire qui correspond aux besoin des populations en situations de vulnérabilités. « La communication était fluide, ils étaient très présents et tout s’est finalement très bien goupillé. C’était même plus simple que ce que je m’étais imaginé. J’ai directement dit que ce qui m’intéressait : c’était d’avoir du contact avec les jeunes. On avait environ une visio par semaine avec un compte rendu, puis j’élaborais la trame du projet pour savoir quel axe on décidait d’avoir, les problématiques, les intervenants et les publics cibles, et comment j’allais travailler avec les jeunes. Puis je validais ensuite l’ensemble avec eux. »

Valoriser l’artisanat : reportage sur les ateliers-écoles dans la région de Thiès

Le départ d’Alice, en mai 2023 dans la région de Thiès au Sénégal, s’est porté sur la valorisation de l’artisanat avec un projet journalistique. Au travers de micro-interviews, elle a fait valoir les activités des jeunes artisan·e ·s de la région. Dès son arrivée, Alice est placée au cœur de l’action grâce à l’accompagnement de Geneviève, une jeune fille du même âge qui l’aide pour faire la traduction lors d’interview. « Dès le lendemain de mon arrivée, on a commencé les interviews et j’ai également rencontré le référent du projet ».

© Alice Déliau - équipe d’AJE
« On a fait beaucoup d’interviews dès la première journée et cela s’est super bien passer. C’était après avoir eu un premier contact avec les intervenants. Ça a marqué le début du projet et c’était super encourageant de voir que les personnes étaient vraiment contentes de parler et faire valoir leurs activités. »

Au-delà de Thiès ; des interviews jusque Soucouta

Le projet avançait si bien, qu’Alice a pu partir de la région de Thiès, située à l’Est de Dakar, pour se rendre à Soucouta, au sud de Ziguinchor, pour visiter la « ferme école » d’un autre centre d’AJE où des formations en agroécologie sont dispensées. « On a pu rencontrer les autres équipes et projets d’AJE. J’ai donc pu voir d’autres axes sur lequels ils travaillent : avec Ismaëla pour la question de la formation et avec Everienne pour la gestion de la ferme école. D’un point de vue personnel, c’était super intéressant d’être sur place, d’assister aux formations et de rencontrer les jeunes. »

« On a pu se balader, visiter et rencontrer pleins de gens sur place. J’ai même pu aller en Gambie pendant une semaine avec Geneviève qui y avait de la famille, notamment dans la région de Banjul. »

En tout, Alice se sera rendue trois fois à Soucouta lors de son action Pépin avec AJE à Thiès. Elle aura pu voir l’ensemble des projets menés par l’association et rencontrer toutes les équipes, mais aussi aller au-delà de ce qui était originellement prévu. Une expérience de dépassement de ses limites à toutes les échelles !

Une action solidaire qui valorise l’artisanat sur le long terme

Concernant la gestion du projet sur place avec AJE « on avait une liberté d’emploi du temps absolument incroyable, mais j’ai dû réadapter des choses. Car on avait prévu une trame principale pour savoir où on allait, mais finalement tout s’est goupillé sur place au fur et à mesure. Par rapport au planning, étant donné qu’on avait énormément de liberté, c’était à nous de prendre les devants » nous rapporte-t-elle.

© Alice Déliau - jeunes artisans interviewés par Alice

L’objectif est de valoriser leurs parcours au sein de cette formation, depuis leur intégration jusqu’à la création de leurs propres activités. Cette formation contribue notamment à ouvrir de nouvelles opportunités professionnelles à des jeunes en situation de vulnérabilité. Ce reportage cherche à donner envie à d’autres jeunes de suivre cette voie, de devenir artisans et de promouvoir le patrimoine et l’identité culturelle sénégalaise. Il a aussi pour vocation d’initier les jeunes au milieu de la vidéo, les impliquant à chaque phase du reportage, de la réflexion jusqu’au montage « J’ai pu leur expliquer comment fonctionnait le logiciel de montage. » De cette manière, les jeunes pourront par la suite mettre en place d’autres actions de communication vidéo « Le but c’était que les employé·e·s d’AJE s’approprie les contenus, afin que ça leur serve pour la suite. » L’objectif est en effet de faire perdurer la valorisation de leur artisanat avec un transfert de compétences « les artisans eux-mêmes vont pouvoir diffuser les vidéos sur leur propre compte. Ils étaient hyper contents car c’est gratifiant de voir le temps consacré à l’interview, et que le travail et le temps fourni peut être montré. J’ai eu le sentiment que c’était très gratifiant pour eux. En effet, faire ce travail était aussi en adéquation avec leurs besoins car ça venait compléter l’accompagnement qu’ils avaient sur le montage d’un projet professionnel, comment le mettre en valeur et le faire tenir sur le long terme. »

Au-delà de l’action : un apprentissage et un dépassement personnel

Une Pépin rentre toujours des souvenirs plein la tête et des nouveaux apprentissages en poche. Alice nous confie avoir beaucoup gagné en apprentissage personnel « sur place étant donné que c’était à nous d’y aller à fonds, ça m’a sorti de ma zone de confort et ça on en a tous un peu besoin. Je voulais me dépasser, et là-bas, je rencontrais des gens toute la journée, qui ne parlent pas la même langue, c’est énergivore, mais dans le bon sens. J’ai vu une cohabitation de tellement d’ethnies différentes qui était très inspirante. Il y a un mix culturel énorme, même d’un point de vue religieux. Partout, les gens étaient super bienveillants. Là-bas l’espace-temps est vraiment différent. Faut apprendre à s’y faire. Mais ce qui n’est pas plus mal, car ça nous apprend à prendre le temps d’apprécier le temps. La notion du « temps perdu » n’est pas du tout la même. »

En effet, une action pépin, c’est l’action solidaire, mais c’est aussi l’aventure humaine  ; « Je suis tombée sur des personnes géniales, que ce soient les jeunes de mon âge ou les autres. Je ne m’attendais pas à créer autant de liens. Que ce soient les jeunes, ou les salariés, chez qui on finissait même par dormir par moment. Puis la Gambie ! Que ce soit dans le projet ou hors projet, on a vu des luttes, des concerts, des spectacles, de façon générale la vie quotidienne était captivante. C’est vraiment une expérience très immersive, on se donne à fonds donc tout est décuplé en termes d’émotions. »

© Alice Déliau - Alice et Geneviève*
L’immersion en terres inconnues dépayse totalement et remet en question nos propres rapports au travail, au temps et à l’alliance : « Le fait que j’étais constamment qu’avec des locaux fait que tout était différent de l’approche eurocentrée dans la façon de travailler. Comment on appréhende les choses, comment on organise un planning et comment on s’organise au quotidien, tout était différent. On peut penser que les choses sont plus décousues, mais on arrive finalement aux mêmes résultats tout en étant dans la co-construction. »
*Elle l’a accompagnée tout le long de son projet, dans ses déplacements, notamment pour faire la traduction lors d’interviews

Frères des Hommes met à disposition des futur·e·s pépins tout un panel de formations sur la transformation sociale, la façon de faire l’alliance et la volonté de ne pas reproduire les schémas de domination au sein des actions solidaires avec ses partenaires. L’accompagnement citoyen du Pépin est une partie capitale de son action et trouve toute son utilité lorsque le Pépin revient pour dresser son bilan ; «  j’ai trouvé que tout ce parcours était complémentaire et nous donnait tous les outils dont on peut avoir besoin en amont d’une action Pépin, puis les outils intranet nous ont beaucoup aidé et guidé pour l’action. D’un point de vue général, je pense avoir bien compris comment monter un projet, comment dialoguer avec les personnes, quels rendus faire pour réussir à se projeter, même si la majorité se fait sur place. Cela étant, on est accompagné mais il faut comprendre que c’est à soi de prendre des initiatives et de s’organiser, d’être force de proposition et de faire des impulsions.  »

Les Pépins reviennent généralement avec une approche transformée de la façon de faire l’alliance « Oui il existe des rapports de domination au Sénégal entre les hommes et les femmes, culturellement on voit que les rapports de domination sont très encrés, mais en tout cas au sein de l’ONG j’ai trouvé que les choses se faisaient relativement horizontalement, ce qui change de notre modèle à nous, très vertical et hiérarchique. Ce qui est en alignement avec ce qu’on dit au sien de la Pépinière et Frères des Hommes. Tout le monde est sur le même plan et à sa pierre à apporter à l’édifice, en co-construction. Prendre ma place a finalement été très simple. Toutes les conditions sont réunies pour que tu te sentes à l’aise et tout ce que tu dis est pris en compte. »

Enfin, son petit conseil à quiconque souhaiterait effectuer une action au Sénégal  : « si la personne part au Sénégal, elle doit savoir qu’on doit se couvrir, car c’est un pays majoritairement musulman. Et en termes de budget il faut demander s’il y a un accompagnateur car c’est à prendre en compte dans le tutorat, et qu’il faut donc compte compter pour deux. »

En conclusion

Une action Pépin est un projet de longue haleine et multifacettes. Si ce projet vous a plu, vous pouvez suivre le compte Instagram @reportage_thies.sn où vous pouvez retrouver les vidéos d’Alice. Le compte est depuis géré par AJE grâce aux partages de connaissances et de compétences. En conclusion, Alice a appris le fonctionnement d’une ONG, s’est conforté dans ses projets professionnels, a découvert une nouvelle culture, s’est nouée d’amitié avec de nouvelles personnes et rentre en France avec des souvenirs plein la tête ainsi qu’une grande envie d’y retourner et de poursuivre ses efforts pour la solidarité : « ça me donne encore plus envie de m’investir dans le solidaire pour la suite, surtout maintenant qu’il y a un volet France au sein de la pépinière. »

Toi aussi concrétise tes convictions avec la Pépinière de la Solidarité internationale en cliquant ici.

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